Pourquoi certaines personnes parviennent-elles à travailler dans un bureau chaotique parmi des montagnes de livres tout en restant efficaces ? On entend souvent qu’il faut ranger son bureau pour éviter de se distraire, mais les plus grands génies semblent évoluer dans des environnements beaucoup plus désordonnés. Certaines études indiquent en effet que le désordre favoriserait la créativité, mais aucune ne relie clairement désordre et intelligence.
Peut-être qu’un bureau flambant neuf équipé des derniers gadgets de la tech permettra de gagner en productivité, mais le reste est-il vraiment le résultat de notre concentration ? Pouvons-nous mettre en place des habitudes appuyées par la science pour mieux travailler ?
The basics (2 min)
Un temps pour tout : les phases de la journée (1 min)
Lumière, le comeback (2 min)
Je regarde où ? (3 min)
Un bon son pour travailler (1 min)
Assis ou debout ? (1 min)
Pour résumer tout ça (1 min)
Hey desk users !
L’objectif aujourd’hui n’est pas de vous poussez à ranger votre bureau, d’y installer des plantes ou d’acheter un indispensable clavier mécanique. La recherche a montré que plusieurs mécanismes dans notre corps peuvent être sollicités afin d’optimiser nos temps de travail, d’études ou de créativité. Au lieu d’un condensé de blogs et de vidéos YouTube de setup de bureau, cette newsletter se veut un état de l’art de cette recherche.
The basics
Commençons par les généralités : l’environnement de travail dans lequel vous vous installez ne fait pas tout ! Certains parviennent à se concentrer et être extrêmement productifs dans des endroits qui transgressent toutes les recommandations de cette newsletter.
On considère également qu’il faut environ 6 minutes pour entrer dans un état de concentration. Les cas de figures qui échappent à cette règle sont ceux où la personne est soit très stressée soit très excitée par son travail. Dans ces situations, on peut estimer que l’environnement a peu d’importance sur la productivité.
Mais pour nous tous qui souhaitons être plus alertes et productifs devant notre bureau, un environnement de travail sain fait sans doute partie de la solution.
Le plus important lorsque l’on est installé pour travailler est d’éviter les interruptions. Ce qui est embêtant n’est pas l’interruption en soi mais le temps nécessaire pour se concentrer à nouveau.
🧰 Il convient d’éviter son portable et toute autre distraction au travail (par des collègues, email, notification…). Freedom permet par exemple de bloquer l’accès à internet à son téléphone pour bloquer les distractions. Tous les moyens sont bons.
🧰 Le Pr. Huberman nous propose dans son podcast une méthode pour minimiser l’impact des interruptions qu’il utilise personnellement : si quelqu'un entre dans votre bureau ou votre espace de travail, reconnaissez sa présence, mais ne bougez pas votre corps et ne vous orientez pas dans sa direction. Continuez votre discussion en gardant votre regard orienté vers l’objet sur lequel vous étiez concentré(e).
Attention tout de même à utiliser cette technique sur des gens qui ne le prendront pas mal (donc pas votre boss).
🧰 Ce que je fais : Je mets mon portable en mode “Travail” (une version similaire au “Ne pas déranger”, voir épisode 8).
J’ai remarqué que ma capacité de concentration et ma tolérance aux perturbations varient énormément (elle dépend de plusieurs paramètres plus ou moins identifiés : le moment de la journée, ma fatigue, mon intérêt pour la tâche, le type de tâche…). Parfois, je m’oblige à mettre mon portable dans une autre pièce (ou au moins l’écarter physiquement) pour éviter de me laisser distraire. Certains jours, une notification devant mon nez ne me fait pas broncher. Je m’adapte.
La bonne nouvelle dans tout ça ? En optimisant son environnement de travail, on peut réduire le temps de re-concentration. Voyons ensemble ce qu’implique cette optimisation.
Un temps pour tout : les phases de la journée
Dans l’épisode 1, je vous parlais du rythme circadien : notre corps fonctionne sur des cycles de 24h. Il est habitué à dormir, manger ou être exposé à la lumière chaque jour aux mêmes heures.
Les neuromodulateurs (comme la dopamine et l’adrénaline) ainsi que la plupart des hormones sont sécrétés suivant ce rythme. Tout cela nous permet de distinguer 3 phases dans la journée :
☀️ Phase 1 : 0 à 8 heures après le lever
Durant cette phase, l’adrénaline, la dopamine ou encore le cortisol (entre autres) sont à des niveaux élevés. Nous sommes alors dans un état plus alerte qui peut être accentué par l'observation de lumière naturelle, la caféine, le jeûne, etc..
La recherche montre également que cette phase favorise le travail analytique et méthodique (c’est le moment de se faire une grosse session sur Excel) et tout travail que vous trouvez particulièrement difficile. Il ne s'agit pas seulement de se débarrasser des choses les plus importantes, mais de tirer parti de votre biologie naturelle.
💡 Phase 2 : 9 à 16 heures après le lever
Durant cette phase, la sérotonine (un autre neurotransmetteur en -ine, qui vient compléter la collection) prend le dessus dans le cerveau. Nous sommes plus à même d’entreprendre un travail créatif et abstrait (comme le brainstorming).
🕯️ Phase 3 : 17 à 24 heures après le lever, aussi appelée la nuit
Vous vous en doutez, ce n’est pas le point d’attention de cette newsletter. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut la négliger !
Maintenant que l’on a posé les bases, on peut commencer à parler d’outils pour optimiser son espace de travail !
Lumière, le comeback
Je sais, j’ai déjà écrit une newsletter sur le sujet. Mais je vous promets de résumer ce que j’ai déjà dit et de l’appliquer à l’espace de travail en quelques lignes seulement.
☀️ Phase 1 (0-8h après le lever)
Rappelez-vous, c’est la course à la lumière. Durant cette phase, on essaie de s’exposer à un maximum de lumière, même devant le bureau. Idéalement, la lumière est intense et vient du dessus (vous allez comprendre pourquoi je dis ça). Toute la lumière à laquelle vous pouvez vous exposer (sans vous faire de mal ou exploser les charges EDF) est bonne à prendre - y compris la fameuse lumière bleue des écrans.
La lumière naturelle du soleil est reine dans l’exercice (sachant que les fenêtres la rendent 50 fois moins efficace, donc si vous pouvez les ouvrir, faites le !).
Pour les futurs médecins : Le fait que la lumière vienne du dessus de notre tête peut paraître étrange, mais il y a bien-sûr une justification biologique à cela. Les cellules ganglionnaires de la mélanopsine (des neurones de nos yeux) principalement présentes dans la partie inférieure des yeux surveillent ce qui est perçu dans le champ visuel supérieur (donc la lumière qui vient du haut). Ce sont elles qui envoient un message correspondant à un état de vigilance à une région du cerveau appelée l’hypothalamus. Ce mécanisme permet d’améliorer la concentration en favorisant la sécrétion de dopamine et d’adrénaline.
💡 Phase 2 (9-17h après le lever)
On prépare son système à la nuit, on baisse donc la luminosité de la pièce dans laquelle on travaille en privilégiant les lumières basses (plutôt que venant du dessus) et de couleur chaude (jaune ou orange).
Pour ceux qui ne peuvent pas se passer d’écrans (j’en fais partie) : Il convient d’éviter la lumière qui vient de dessus et la lumière bleue. Essayons donc de baisser la luminosité de nos écrans durant cette phase et d’éteindre les LEDs blanches (qui ne sont pas très jolies en plus).
🧰 La plupart des écrans ont des modes pré-enregistrés avec des luminosités plus faibles et des couleurs plus chaudes (cherchez les mots “lecture” ou “éco”).
🕯️ Phase 3 (la nuit)
Vous le savez mais je préfère le rappeler au cas où, on évite au maximum toute source de lumière (y compris pour aller aux toilettes la nuit, si toutefois vous y parvenez sans vous faire mal).
Si vous devez travailler durant cette phase, maintenez une luminosité et une température dans la pièce faibles afin de vous endormir plus facilement.
Je regarde où ?
Un classique des nerds de la productivité : l’objet que vous regardez quand vous travaillez (écran, livre, tablette graphique pour les plus talentueux d’entre nous) doit se situer à hauteur des yeux.
Ce n’est pas qu’une raison de posture, bien que ce soit un argument important. Il s’avère qu’il y a un lien direct entre la direction de notre regard et notre vigilance.
👀 Pour les pros de la biologie : Lorsque l'on regarde vers le sol, les neurones liés au calme et à la somnolence sont activés. À l’inverse, en regardant vers le haut, les neurones envoient au cerveau une information correspondant à un état de vigilance.
Pour cela, plusieurs possibilités pour tous les budgets :
Vous pouvez surélever votre ordinateur avec des livres ou une boite de sorte à ce qu’il soit en face de vos yeux (en prévoyant un clavier et une souris).
Un deuxième écran reste la solution idéale (à condition qu’il soit placé devant le corps et à hauteur des yeux).
Il existe également des bras mécaniques qui permettent d’ajuster la hauteur et l’inclinaison de votre écran.
Il existe d’autres leviers visuels qui permettent d’optimiser votre espace de travail pour la productivité.
📄 Une étude de 2007 explore le rôle de la hauteur du plafond sur notre manière de travailler. Une expérience a comparé les réactions des participants à des problèmes analytiques et d’autres plus abstraits dans des pièces de 2,4m et 3m de hauteur. Elle a permis d’identifier ce que l’on désigne désormais comme le cathedral effect (”effet cathédrale”). On entretient des réflexions plus abstraites et créatives lorsque le plafond est plus haut. À l’inverse, un plafond bas (ou un champ de vision restreint verticalement, par une casquette ou une capuche) entraîne des pensées plus analytiques, orientées vers des objets concrets et réels.
Mettons également à profit ce que nous savons sur les différentes phases de la journée :
🧰 Le hack du jour : En combinant les enseignements issus des deux phases de la journée et le cathedral effect, on peut choisir de travailler :
Dans la première phase de la journée (0-8h après le réveil) et dans une pièce avec un plafond bas (ou avec une casquette ou une capuche si c’est votre truc) sur des problèmes plus analytiques et détaillés,
Dans la 2ème phase de la journée (9-17h après le réveil) et dans des salles avec un plafond haut (ou dehors, sky is the limit) sur des projets qui demandent plus de créativité.
Il n’existe pas de recherche suggérant que changer d’endroit pour travailler durant la journée (entre le matin et l’après-midi par exemple) a une quelconque influence sur la productivité.
Attention tout de même à respecter l’exposition à la lumière le matin (ce qui n’est pas forcément idéal avec un plafond bas ou une capuche, je le conçois). Si l’on devait privilégier un des outils, l’exposition matinale à la lumière reste prioritaire.
Un bon son pour travailler
Nous l’avions déjà évoqué dans l’épisode 8 : le bruit de fond lorsque l’on travaille peut avoir une influence sur notre capacité à nous concentrer. Et puisqu’on en a tous marre d’écouter “Travailler en musique” et ses variantes sur Spotify, résumons ce que la science nous dit sur l’environnement sonore pendant le travail :
Ce que nous savons :
La tolérance au bruit varie d’un individu à un autre mais aussi pour un même individu d’un moment de la journée à un autre. En fonction des jours, un bruit peut s’avérer être un stimulant ou un obstacle à la concentration.
Les bruits blancs, roses ou bruns peuvent créer des conditions propices à la concentration, la mémoire ou encore la productivité. Mais ces mêmes bruits peuvent également entraîner des perturbations des fonctions cognitives et une fatigue générale lors d’une écoute prolongée (en particulier à des niveaux sonores élevés).
🧰 L’idéal est de préparer ses séances de travail avec des battements binauraux (BB) à 40 Hz (en évitant de choisir des BB de plus basses fréquences ou avec des fonds sonores de pluie ou une mélodie qui atténuent ces effets).
Assis ou debout ?
Je ne pense pas être le premier à vous l’annoncer : rester assis pendant 8 heures ou plus durant la journée a des conséquences importantes sur la santé (sommeil, posture, douleurs cervicales, problèmes de cognition et de digestion...). Là dessus, les résultats de la recherche sont sans appel.
Nous n'avons pas été conçus pour rester assis toute la journée, mais nous n'avons pas non plus été conçus pour rester debout toute la journée. Et il faut aussi être réaliste, la plupart d’entre nous travaille à un bureau sans autre option que de s’asseoir. À moins d’être la seule personne de l’open space qui reste debout (style Charles Boyle juste en dessous), il faut bien s’asseoir une majorité de la journée pour bosser.
🧰 Pour ceux qui ont la chance d’avoir un standing desk (mon rêve ultime) : Utilisez-le ! L’idéal est de combiner des périodes de travail assis et d’autre debout. Essayez de rester debout un maximum (jusqu’à la moitié du temps de travail), mais si vous commencez à vous appuyer avec vos avant-bras sur la table, c’est un signe que vous fatiguez et il vaut mieux s’asseoir pour éviter de vous déconcentrer.
🧰 Pour les autres : Essayez de vous lever lors de vos pauses (le plus fréquemment possible), profitez-en pour vous balader dehors, vous faire un café (mais ne vous asseyez pas durant votre pause !).
🚲 Pour la team bureau équipé d’un tapis de course ou d’un vélo (je veux vous rencontrer) : Les postes de travail actifs sont idéaux pour améliorer le niveau d'attention et la cognition. Cependant, la recherche montre que la mémoire verbale est dégradée dans ces conditions.
Pour résumer tout ça
Quand on se met en face du bureau, beaucoup de paramètres peuvent déterminer son efficacité pour la session de travail à venir. À moins d’être très stressé(e) ou excité(e) par l’objet de la session de travail, attendez-vous à avoir besoin d’un certain temps avant d’être 100% concentré sur votre tâche. Certains outils comme la lumière, le son, la disposition de votre bureau ou encore la caféine vous permettront de vous mettre au travail plus rapidement.
Vous avez été plusieurs à apprécier les schémas récapitulatifs en fin de newsletter. Je me prête de nouveau au jeu cette semaine :
Et on ne perd pas les bonnes habitudes, vous choisissez le thème de la prochaine newsletter :